Le braille : Un Héritage Tactile Inestimable

Salut les amis,

Aujourd’hui, et parce que cette année 2024 marque la célébration du 200e anniversaire de l’invention du braille, je souhaitais revenir sur une innovation qui a profondément transformé la vie de millions de personnes aveugles et malvoyantes à travers le monde.

Les origines

Louis Braille est né le 4 janvier 1809 dans le village de Coupvray, en France. Son père, Simon-René Braille, était sellier, et Louis aimait jouer dans l’atelier familial. À l’âge de trois ans, Louis se blessa gravement à l’œil avec un poinçon en jouant avec les outils de son père. L’infection qui en résulta se propagea à l’autre œil, le laissant complètement aveugle.

Malgré ce handicap, Louis était déterminé à poursuivre ses études. Il fréquenta l’Institution Royale des Jeunes Aveugles à Paris, l’une des premières écoles spécialisées. À cette époque, les méthodes d’enseignement pour les aveugles étaient rudimentaires et inefficaces, reposant principalement sur des lettres en relief peu pratiques et difficiles à lire.

En 1821, Charles Barbier, un capitaine de l’armée française, visita l’institution et présenta son système de “lecture nocturne” aux élèves. Ce système reposait sur une série de points en relief pour permettre aux soldats de lire des messages dans l’obscurité sans utiliser de lumière. Cependant, le système de Barbier était trop complexe et difficile à utiliser, car il se basait sur des cellules de 12 points, rendant la lecture tactile laborieuse.

Reconnaissant le potentiel de cette méthode, Louis Braille commença à travailler sur une version simplifiée. À seulement 15 ans, il développa un code utilisant des cellules de 6 points au lieu de 12, permettant à chaque caractère d’être lu en un clin d’œil tactile. Cette innovation rendit la lecture et l’écriture beaucoup plus rapides et efficaces. En 1829, il publia le premier livre décrivant son système.

Louis Braille continua à améliorer et à promouvoir le braille tout au long de sa vie. En 1837, il ajouta des symboles pour les mathématiques et la musique, élargissant encore les possibilités offertes par le braille. Malgré l’efficacité de son invention, le braille ne fut pas immédiatement accepté. Il fallut plusieurs années avant que l’Institution Royale des Jeunes Aveugles ne reconnaisse officiellement ce système. Ce n’est qu’après la démonstration réussie du braille à l’inauguration d’un nouveau bâtiment de l’institution en 1844 que le système commença à être adopté plus largement.

Louis Braille mourut en 1852 à l’âge de 43 ans, sans avoir vu son invention pleinement reconnue de son vivant. Cependant, son héritage perdura. En 1854, la France adopta officiellement le braille comme système de lecture et d’écriture pour les aveugles, et il se répandit rapidement à travers le monde. En 1878, le braille fut adopté comme système international de communication pour les aveugles lors d’un congrès à Paris.

L’Évolution du Braille à Travers les Siècles

Depuis sa création, le braille a évolué pour devenir un outil indispensable non seulement pour la littérature, mais aussi pour les sciences, les mathématiques, la musique et les technologies informatiques. Des codes spécialisés, tels que le braille musical et le code Nemeth pour les mathématiques, ont été élaborés pour répondre aux besoins spécifiques des utilisateurs.

Le 4 janvier, reconnu comme la Journée mondiale du braille, offre l’opportunité de sensibiliser le public à l’importance de ce système et de promouvoir l’accès universel à l’alphabétisation en braille. Cette journée rappelle également les droits et libertés fondamentaux des personnes aveugles et malvoyantes.

Braille et Technologie

L’intégration du braille dans les technologies modernes a ouvert de nouvelles perspectives. Des dispositifs tels que les afficheurs braille électroniques et les montres tactiles permettent aux utilisateurs de naviguer dans le monde numérique avec une autonomie accrue. La collaboration entre diverses organisations pour développer des dispositifs tactiles dynamiques montre l’engagement continu à améliorer l’accès au braille.

Du danger de l’usage intensif des synthèses vocales

Bien que le braille soit un outil essentiel pour l’alphabétisation et l’indépendance des personnes aveugles, l’utilisation croissante des synthèses vocales présente une dichotomie préoccupante. De nombreuses personnes aveugles se tournent désormais vers des technologies de synthèse vocale pour accéder à l’information en raison de leur commodité et de leur rapidité. Cependant, cette tendance peut poser des problèmes à long terme.

En effet, les synthèses vocales, bien qu’efficaces pour la consommation rapide d’informations, ne permettent pas de développer les compétences en lecture et en écriture de la même manière que le braille. Le braille offre une compréhension tactile de la structure des mots, de l’orthographe, de la grammaire et de la ponctuation, éléments vitaux pour une véritable alphabétisation. En négligeant le braille, on risque de compromettre l’autonomie et l’accès à l’éducation de qualité pour les jeunes générations non-voyantes.

L’Importance du Braille pour les Personnes Atteintes de Surdicécité

Le braille a également joué un rôle déterminant pour les personnes atteintes de surdicécité, leur offrant un moyen vital de communication et d’accès à l’information. La combinaison de déficiences auditive et visuelle pose des défis uniques en matière de communication. Le braille permet à ces individus de lire et d’écrire, facilitant ainsi leur participation à la vie quotidienne et leur autonomie. Des méthodes telles que la langue des signes tactile et l’utilisation de dispositifs spécialisés (notamment associés aux retours haptiques) ont considérablement amélioré la qualité de vie des personnes sourdaveugles, leur permettant de s’engager pleinement dans la société.

Le futur s’écrit aussi en braille

Alors que nous célébrons ce bicentenaire, il est impératif de continuer à soutenir et à promouvoir l’accès au braille. Les initiatives éducatives et les programmes de sensibilisation jouent un rôle essentiel pour garantir que les générations futures puissent bénéficier des avantages du braille. Les efforts doivent se concentrer sur l’amélioration de la disponibilité des ressources en braille et sur la sensibilisation à son importance dans la vie quotidienne des personnes aveugles et malvoyantes.

En honorant le 200e anniversaire du braille, nous rendons hommage à l’héritage de Louis Braille et réaffirmons notre engagement à créer un monde où chacun, indépendamment de ses capacités visuelles, peut accéder à l’éducation, à l’information et à l’autonomie.

Kevin, brailliste engagé. 😇 👋

15 réflexions sur « Le braille : Un Héritage Tactile Inestimable »

  1. Merci pour cet article. En ce qui me concerne, j’ai toujours préféré le braille. D’ailleurs, la voix d’Audrey me rend cinglée.☺️

    1. Je ne peux qu’abonder dans ton sens, a fortiori, parce que l’usage du braille concomitamment à la désactivation de la synthèse vocale s’avère bien plus efficient pour suivre d’autres évènements malgré l’utilisation de l’iPhone par exemple.
      Avec la synthèse vocale, il y a nécessairement un déficit accru de l’attention. En ce sens, le tactile pourrait être comparé à la vision dans ce cadre…

      1. Bonjour,

        tout dépend de chacun, nous n’avons pas tous les mêmes modes d’apprentissage, que l’on soit voyants ou déficients visuels et certains vont être plus efficace avec l’auditif, mais sans lien avec ou non le manque de vision. En ce sens, je te rejoins tout à fait sur le parallèle du tactile et du visuel. J’ai personnellement un mode d’apprentissage visuel et kinesthésique, j’ai besoin de voir les mots pour retenir les choses et de bouger pour apprendre ! Alors que l’auditif me pénalise. C’est pour ça que dans l’enseignement, il faut des activités qui mélange tous les modes d’apprentissage pour ne pas défavoriser certains enfants et que de ce faite, le braille est plus qu’important, imagine ne donner que de l’auditif à un enfant qui a un mode d’apprentissage visuel ? On va dire qu’il a des difficultés alors qu’en fait, c’est la méthode qui n’est pas adaptée… 🙁

  2. Déficiente visuelle, sans le braille je n’aurais pas pu finir mes études universitaires car même si je peux lire un peu en noir je suis incapable de me relire… devenue sourde, comment aurait je pu lire et me cultiver en attendant la pose d’un implant cochléaire?
    Je mesure la chance que j’ai d’avoir appris le braille malgré mon reste visuelle.

    1. Ton témoignage est touchant et illustre à merveille l’importance capitale du braille pour tant de personnes. Il est admirable de constater à quel point cette méthode t’a soutenue dans ton parcours universitaire et personnel. Pouvoir lire et s’instruire, même en attendant une aide auditive, est un droit fondamental qui doit être garanti à chacun. Ton histoire met également en lumière la valeur d’apprendre le braille, même pour ceux qui possèdent un reste visuel. Je te remercie de partager ton expérience et de rappeler l’importance vitale de promouvoir et de soutenir l’accès aux outils d’apprentissage pour tous.

  3. J’utilise le braille quotidienement. Je coupe souvent la synthèse vocale car ça me fatigue.
    J’aime aussi lire du braille sur papier. je trouve ça plus agréable que sur plage braille.
    En tout cas, je ne pourrai pas me passer du braille.

    1. Je comprends parfaitement la fatigue engendrée par la synthèse vocale et l’attrait pour la lecture en braille sur papier, qui offre une sensation irremplaçable. Il est clair que le braille reste un outil indispensable dans nos vies. Merci de partager ton expérience.

  4. Bonjour Kevin et tous,

    Quel bel édito. 😊

    Je suis aussi une lectrice en braille, intégral et abrégé. Je l’ai appris quand j’ai commencé à perdre ma vue à l’adolescence. Je n’ai pas eu de difficultés pour l’apprendre, mais plus pour la vitesse de lecture. C’est une chance que là où j’étais les livres audio n’étaient pas mis en avant et qu’on n’avait pas encore accès aussi facilement à l’informatique et les synthèses vocales, sinon, peut-être que je les aurais privilégiées pour un gain de temps. Aujourd’hui, je ne lis probablement pas aussi vite que ceux qui l’ont appris en même temps que l’apprentissage de la lecture, mais j’ai une vitesse correcte pour rester des heures à lire un livre sur papier. Dommage que ça prenne autant de place et qu’on ne les trouve pas dans les bibliothèques municipales, à part dans quelques villes en France. En revanche, sur afficheur braille, je fatigue vite, le fait de passer à la ligne suivante ce n’est pas confortable, le mode automatique est pratique, mais parfois ça va trop vite et parfois pas assez selon les mots sur la ligne. Malgré tout, je trouve les livres au format brf plus agréables à lire qu’un epub sur iPhone parce qu’ils respectent le braille abrégé et la mise en page, en tout cas sur les récents. C’est un peu le parallèle pour les voyants, c’est moins fatigant pour les yeux de lire sur papier, ben pour moi idem pour mes doigts. 😉

    La seule chose pour utiliser le Mac ou l’iPhone, dans mon cas, uniquement en braille, c’est l’accessibilité, je n’ai pas forcément la patience ! 😂

    Longue vie au braille, et j’espère qu’un jour les images tactiles et leur apprentissage seront aussi répandues !

    1. Bonjour Assia,

      Merci pour ton message.
      Ton parcours avec le braille est vraiment inspirant.
      Je comprends les défis que tu mentionnes, surtout avec les afficheurs braille ; peut-être que les progrès significatifs en la matière viendront des afficheur multiligne, pour une lecture bimanuelle.
      J’espère aussi que les livres en braille seront plus accessibles dans les bibliothèques et que les images tactiles se développeront, car elles pourraient bien contribuer à la prochaine révolution technologique en approche, dont l’intelligence artificielle constitue le fer de lance. ☺️

  5. Merci pour cet article Kevin! Pour moi, rien ne vaut le Braille! Les synthèses vocales, certes, nous apportent une aide précieuse, d’autant plus qu’elles se sont bien améliorées au fil du temps. Mais le Braille! Et à 8 points en plus! Aveugle de naissance, j’ai commencé à l’apprendre à 5 ans. Je lis rarement sur papier et je ne me sers plus de la tablette, ou très peu; mais, en numérique, j’ai une jolie bibliothèque. Le fait de lire sur la plage Braille ne me dérange pas, pourvu que je puisse lire! Merci Monsieur Louis Braille et longue vie à notre chère écriture!!!

    1. Il est remarquable de constater à quel point cette méthode de lecture reste essentielle, même avec les avancées technologiques actuelles.

      Je partage pleinement ton enthousiasme pour le Braille numérique. En effet, ce format présente l’avantage de simplifier la gestion de l’espace de stockage et permet l’accès à des ouvrages souvent indisponibles en version papier. Ta bibliothèque numérique témoigne de la modernité et de la pertinence continue de cette écriture.

      Apprendre le Braille dès l’enfance, comme tu l’as fait, constitue un atout inestimable. Cela offre une base solide pour l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, tout en favorisant une plus grande autonomie.

      Ton témoignage rend un bel hommage à Louis Braille et souligne l’importance de préserver et promouvoir cette forme de communication.
      Merci de nous avoir partagé ta passion avec autant de conviction ! 💐

  6. Bonjour,
    Entièrement d’accord avec ce qui a été dit. Et que ferais-je sans la saisie braille à l’écran? C’est vraiment une tuerie ce truc. Vraiment, si vous êtes bons braillistes, (et en abrégé, je n’en parle même pas), penchez-vous sur cette fonctionnalité génialissime.
    Je dirais qu’il faut au moins une bonne semaine d’utilisation intense et régulière pour se dire: “Oh mais c’est top! Pourquoi ne pas l’avoir utilisé plus tôt”. Donc il est vrai qu’il faut un peu insister, mais ça en vaut vraiment la peine.
    Après évidemment, avec les conseils d’une personne habituée, ça va plus vite.
    Et pour ouvrir les apps, c’est dingue aussi.
    Perso dans le rotor je l’ai mise entre caractère et mot, alors imaginez un peu comme ça va vite de l’activer.

    Après, certaines disparaitions du braille m’agacent profondément.
    Ex: sur certaines boîtes de médicament, fini.
    Pas le moindre signe permettant de distinguer la carte d’invalidité du macaron, alors que la carte Vital possède un v en braille depuis longtemps. Enfin… ma vieille carte Vital en possède un, mais il y a peut-être eu une régression dans ce domaine.

    Et que dire des jeux de société? Les billets du Monopoly 5 par 5 dans la Perkins, et toutes les infos sur les cartes des rues resteront une chouette adaptation.

    Pour ceux qui voudraient écouter ou faire écouter la biographie de Louis Braille, (aux enfants par exemple), il y a eu très récemment un potcast fait par Christophe Hondelate sur Europe1, en 2 parties plus un débrief très bien faits je trouve.
    Et puis c’est une invention française, alors ça vaut bien un cocorico. 😉😂

    1. Bonjour Sabrina,

      La saisie braille virtuelle est effectivement une innovation remarquable, et une utilisation régulière permet d’en tirer la quintessence.

      Je partage totalement ton irritation face à la disparition du braille sur certains objets essentiels comme les boîtes de médicaments et les cartes d’invalidité. Cette régression est regrettable et mérite d’être corrigée.
      Merci pour ce commentaire empreint d’enthousiasme et de discernement. ☺️ 🙏

  7. @Kevin, merci pour cette publication. À l’instar de plusieurs personnes dans ce fil de commentaires, j’ai une mémoire plutôt visuelle et kinesthésique. Je me souviens qu’au cours de mes études, je n’ai jamais eu d.aussi bons résultats que quand je révisais mes cours en les lisant en braille. À l’inverse, lorsque j’ai tenté de le faire à la synthèse pour gagner du temps, je me suis vite rendu compte que ma mémoire auditive saturait vite. aujourd’hui, hormis des livres audio lus par des professionnels, je suis un gros consommateur de livres numériques en braille abrégé. ma soif d’apprendre et ma passion pour le braille m’a même conduit à apprendre et à avoir une parfaite maîtrise du braille abrégé dans d’autres langues pour lesqelles le système est au point et efficace, notamment en anglais et allemand.

  8. Bonsoir à tous,

    Merci Kevin pour cet article très intéressant. Personnellement, j’ai appris le braille lorsque j’avais 6 ans et je trouve que c’est une écriture assez impressionnante. Aujourd’hui, il est vrai qu’elle est mise un peu à l’écart, notamment parce que certain(e)s d’entre nous, ( dont moi)), ont tendance à privilégier la synthèse vocale. Je suis assez partagé par rapport à cela : j’utilise le braille lorsque je suis en classe et lorsque je révise, mais si les cours que je dois réviser sont trop longs, j’active NVDA pour les lire par le biais de la synthèse vocale (je suis sur Esytime). En dehors de cela, lorsque je suis sur mon PC portable, (pas l’Esytime), j’utilise exclusivement NVDA avec la synthèse vocale. Ce n’est pas forcément une bonne chose, j’en suis conscient et c’est pour cela que lorsque je lis en braille, j’apporte une attention particulière sur l’orthographe des mots, des noms propres etc. Demain, je passe l’écrit du bac de français, donc je vais lire le sujet en braille et vais faire preuve de concentration, car personnellement, à force de lire, je fatigue assez rapidement.

    Voilà pour mon témoignage. Bonne soirée à tous.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *